Le travail c'est la santé ?! (par Damien)

Je cherchais une formule accrocheuse pour démarrer cette réflexion avec vous quand m'est revenue cette expression, latente en mon esprit, mémorisée à je ne sais quelle occasion et qui s'est tout de suite imposée dans cette situation où je souhaite interroger la notion de Travail. "Le travail c'est la santé" ... Je me suis d'abord demandé d'où pouvait bien venir cette chose étrange, à première vue insensée d'après moi, et je suis tombé dans un premier temps sur une chanson populaire de Monsieur Henri Salvador, écrite en 1965 (texte ici), et sur un ensemble de propos ironisant cette phrase. Et oui, cela me parait tout à fait concevable de philosopher avec Henri Salvador, au moins de démarrer avec lui. Il y a ce mérite incontestable à accorder à
la culture populaire, au travers de ses œuvres les plus réussies, de faire jaillir l'esprit du temps, de révéler par le langage que nous saisissons tous l'état de nos intuitions, de nos émotions, de nos perceptions communes d'une époque partagée.
Et si cet esprit m'a touché c'est que je n'ai pas la sensation de le retrouver de nos jours. La prise de distance vis-à-vis de ce qui pourrait désormais être devenu une devise a presque totalement disparu. L'inconscient collectif semble s'être pleinement accordé sur cette idée que Travail et Santé sont corrélés. Par santé, je crois que l'on peut y entendre quelque chose de très vaste, ne se limitant pas seulement à l'absence de maladie. Nietzsche parlait de "La grande santé" pour désigner cette énergie traversant les êtres qui étaient poussés à la création, exprimant ainsi leur force, leur puissance. Il s'agirait donc aussi de la santé psychologique et sociale, se rapprochant alors plutôt de l'idée de bien-être, de bonheur, d'épanouissement, résultant d'une vitalité parcourant positivement le corps des individus et de leur société. Et l'idée de travail renvoie bien à cette fonction aujourd'hui : notre jeunesse est consacrée à la formation pour un futur métier, notre vie active est rythmée par l'évolution de notre carrière, l'absence d'emploi crée de la déprime individuelle et le chômage de la déprime collective. Les seuls rares domaines de l'existence tentant de s'extraire de la logique du travail (retraite, vie de famille, loisir) ne doivent en fait leur maintien qu'à une réussite professionnelle solide, ils ne sont que l'autre face du travail sans lequel ils ne peuvent pas émerger : sans cotisation pas de retraite, sans salaire difficulté de subvenir aux besoins de ses proches et impossibilité de sortir, d'avoir une activité sociale. L'existence même de l'individu comme faisant partie du monde des hommes est conditionnée par l'emploi que l'on occupe. Il est ici intéressant de se tourner vers les travaux au croisement de la psychologie et de la sociologie sur cette question (voir notamment la désaffiliation de Robert Castel). Afin de prendre la mesure de cette emprise sur nos vies, pensons à cette première question de sociabilisation qui vient dans une discussion : "que fais-tu dans la vie?". Celle-ci résume, avec la réponse qu'elle induit et dans presque la totalité des cas qu'elle provoque, ce dogme contemporain : sans travail, la santé (toujours dans son sens le plus plein) est presque réduite à néant.
Pour aller au bout de la question qui est ici traitée, il faudrait aussi interroger le travail dans sa définition. Étymologiquement, les origines du terme se rattachent fortement à l'idée de la souffrance physique, de la peine durant l'effort contraint (on parle du travail lors de l'accouchement). Puis l'idée de produire quelque chose, auparavant indépendante, est venue intégrer cette notion première pour arriver à ce que l'on connait désormais plus ou moins comme "se donner de la peine pour ...". L'évolution sémantique, comme toujours, met en lumière la tournure que l'on a souhaité faire prendre au sens des mots. Aujourd'hui a été réussi ce tour de force, presque improbable lorsqu'on en analyse avec le recul la genèse, de postuler que la souffrance est nécessaire à la production, à la création. Entendons-nous bien, pas seulement l'effort, la persévérance, mais bien la souffrance, la peine. Le langage traduit exactement la manipulation opérée lors de l'invention de cette conception. Allons au bout du raisonnement. La souffrance est nécessaire à toute production, la production est réalisée par le travail et vu que le travail c'est la santé, on pourrait sans trop se triturer le cerveau en arriver à : "la souffrance c'est la santé"... Syllogisme douteux me direz-vous, je laisse en juger. Quoiqu'il en soit, je trouve personnellement que cette conclusion dit quelque chose d'essentiel, alors je poursuis.
"Le travail c'est la santé" donc, avec sa traduction masquée "la souffrance c'est la santé", me semble être un formidable outil idéologique pour notre société productiviste. Il est parvenu d'abord à faire de la souffrance une nécessité pour parvenir à quelque chose de noble qu'est la création et ensuite, en la mettant en perspective d'une production socialisée, d'un travail, d'en faire quelque chose qui permettrait à l'individu d'être heureux. Je ne cherche aucunement à partager quelque chose qui est en train d'émerger depuis quelque temps, à savoir l’occultation de l'effort, donnant l'illusion que de grandes choses sont possibles sans aucun travail. Les télé-réalités, les stars footballeurs, les parcours de jeunes milliardaires, participent d'un système masquant les chemins difficiles pour arriver à un certains niveau d'excellence dans un domaine ou construisant des pseudo célébrités qui n'en sont finalement que des éphémères. Ce phénomène est sans doute une réaction opposée à cette idée que sans souffrance rien n'est possible, cherchant à faire croire qu'avec seulement du plaisir beaucoup de choses sont possibles. La vérité est évidemment à trouver dans cet entre-deux, le couple effort/finalité pourraient en être la clé.
Mon avis, qui n'est pas non plus une conclusion très complexe à tirer de tout ça, c'est que l'idée de la nécessité de la souffrance, imposée depuis plusieurs siècles et culminant aujourd'hui dans nos esprits, sert une intention dont la finesse stratégique est à la hauteur de sa perversité. Si l'on souffre en étant persuadé qu'il est nécessaire de souffrir, que c'est obligatoire pour parvenir à de grandes choses ou au moins pour survivre, il n'y a absolument aucune raison que l'on questionne l'origine de cette souffrance. Ce serait forcément inscrit dans la marche des choses, un point c'est tout. Dès lors, cette conception dominante s'étant infiltrée pernicieusement dans l'esprit de la majorité des gens, c'est un gisement de main-d’œuvre extraordinaire qui est à disposition. Une marée de travailleur est ainsi prête, quasiment impatiente, de souffrir. J'en arrive volontairement à cette formulation provocante, caricaturée mais à peine, qui m'impose de relativiser ensuite. Bien entendu que lorsque nous cherchons du travail, ce n'est pas dans le but de souffrir pour souffrir, il y a au moins cette volonté qui nous est propre de toucher un salaire, pour nourrir sa famille, pour avoir une vie sociale, pour mener à bien un projet personnel, ... Mais ce qui est extraordinaire, c'est que beaucoup plus rarement nous nous interrogeons sur le bienfondé de la souffrance que nous allons éprouver lors des tâches que nous aurons à accomplir et de l'activité salariée en général (se lever tôt le matin, rentrer tard le soir, réduire très fortement notre temps libre, voir moins nos amis et notre famille, obéir à une hiérarchie, faire des choses que nous n'aimons pas faire, ...). Ici, c'est d'abord l'effort qui est mis en avant, supposé mériter le salaire que nous toucherons à la fin du mois, alors que la finalité de notre travail est au second plan, ne nous regarde presque pas, est l'affaire de notre employeur. Nous produisons un effort, parce que l'on veut garder sa place en faisant ce que l'on nous demande de faire, mais sur le moment, nous n'avons que peu souvent la justification directe de notre tâche, nous ne savons pas à quoi cela va servir ou alors on le sait et on se rend compte que ça n'est pas vraiment important pour nous. Une question simple : qui continuerait à faire le même travail qu'aujourd'hui s'il était payé même en ne le faisant pas? Seulement voilà, étant donné que nous avons intégré l'idée qu'il était nécessaire de souffrir pour avoir un salaire, pour avoir le droit de vivre décemment, nous ne considérons pas qu'il y a lieu de se plaindre de la situation, même si notre corps et la part indépendante de ce que nous sommes ressentent au fond un vif malaise (voir ici la problématique de la souffrance au travail).
Ce que je voulais tenter ici, c'était d'ouvrir une brèche, pas offrir une solution toute prête à cette question mais envisager un possible différent. Revenons sur le couple effort/finalité et étudions le désormais dans l'autre sens. Nous avons tous des exemples dans nos vies de choses que nous avons réalisées parce qu'elles nous tenaient vraiment à cœur et pour lesquelles nous avons fourni un effort dépassant largement celui que nous sommes prêts à produire à notre travail, lorsque la finalité de notre activité a été définie par quelqu'un d'autre que nous. Je me risque à faire ma conclusion sur ce genre d'expérience : la souffrance n'existe pas ! Pourtant il y a bien eu travail, il y a bien eu production et même une production dont nous percevons précisément l'utilité, à la fois pour nous, mais aussi pour les autres. Nous avons même le sentiment dans ces situations que nous avons été ici plus utile que nous l'aurions été sur notre lieu de travail. Nous pouvons alors revenir sur cette phrase "la travail c'est la santé". Et répondre "oui lorsqu'on élabore nous-mêmes sa finalité". C'est même La grande Santé, celle qui fait preuve de notre vitalité, de notre capacité à dépenser une grande quantité d'énergie pour produire, créer ce en quoi l'on croit. En dehors de cela, non, le travail ce n'est pas la santé, c'est même tout le contraire. C'est une lassitude qui se fait ressentir à ne pas savoir pour quoi l'on agit, en perdant confiance en notre utilité, en notre potentiel à apporter quelque chose d'original, de novateur et de bon au monde. Seulement, lorsqu'une majorité de personnes est en train de croire que leur travail contribue à leur Santé, alors que pas vraiment, elles contribuent effectivement à la santé de quelques-uns, mais la petite santé cette fois, celle illusoire que l'on croit pouvoir obtenir par l'argent. Et c'est autour de cette logique masquée que le système économique actuel est fondé ; ce point là pourra être détaillé une prochaine fois.

Je suis peut-être cruel car je crois avoir tenté de démêler quelques certitudes, quelques habitudes, quelques manières de vivre qui nous rassurent, et pourtant en dernier lieu je n'ai rien de tout fabriqué à proposer pour reconstruire par dessus. Mais c'est en fait la réflexion que je vous propose, qui me semblerait plus riche de manière collective. Pour synthétiser : Comment imaginer un système au sein duquel chaque individu pourrait parvenir à subvenir à ses besoins (et à ceux de ses proches ne travaillant pas ou plus) en apportant ce qu'il souhaite apporter au collectif, ce en quoi il est performant et de la manière dont il apprécie le faire? A ceux qui répondront que ce n'est pas possible, un premier débat pourra s'instaurer où, au moins moi, tenterai de démontrer que cela me semble au contraire tout à fait possible et que ce serait même plus productif à l'échelle collective. Bien sûr qu'il resterait des activités ingrates dont personne ne souhaiterait se charger mais je prônerai alors pour une répartition équitable de ces tâches à l'échelle de l'ensemble des personnes. Ces tâches étant nécessaire pour la collectivité, je pense même que l'idée de souffrance pourrait être atténuée car la finalité du travail serait alors connue et voulue, pour le bien de tous. A ceux qui resteraient accrocher à l'infaisabilité d'un tel système, il s'agira alors de se demander si ce n'est pas une volonté de ne pas voir celui-ci disparaitre car en son sein ils sont gagnants? Il serait alors intéressant de savoir au détriment de qui? Pour les autres qui sont encore motivés, une réflexion de fond pourra être menée afin de définir les bases, le cadre et le fonctionnement indispensables à l'éclosion de ce genre de nouveau modèle.


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15 commentaires:

  1. Tout ça est bien intéressant mais je ne crois pas que ça réponde réellement à la question que tu pose. Je suis parfaitement en désaccord avec ce déferlement d'arguments pour expliquer une chose qui me parait bien simple.

    Le travail c'est la santé pour des raisons beaucoup plus rationnelles qui font intervenir la stimulation intellectuelle et la biophysique. Si on fait abstraction du bonheur mais qu'on parle bien de santé, on peut identifier la sphère physique et la sphère intellectuelle.

    On sait bien que le cerveau est, comme les muscles, un organe qu'il faut stimuler afin de garder performant. L'activité professionnelle maintient cette stimulation cognitive à travers les formations professionnelle, la recherche de productivité qui tend à nous faire réfléchir sur nos méthodes de travail et les rendre plus performantes, plus agréable... selon son domaine d'activité.

    Vient ensuite l'activité physique à travers la biomécanique. Il faut savoir que la densité osseuse est d'autant plus importante que les tendons et muscles sont sollicités. Et justement la majorité des ennuis de santé sont liés à la structure osseuse (dos, genoux, cervicales) qui est elle-même soutenu par les muscles. Les deux sont étroitement liés.
    Il est absolument crucial d'avoir une activité physique afin de maintenir une densité osseuse et une structure musculaire satisfaisante qui permettrons de minimiser les pathologies ciblant les articulations.
    L'activité professionnelle induit une activité physique par la marche quotidienne (ne serait-ce qu'aller au travail et rentrer à la maison), selon la profession on peut également avoir une activité plus ou moins intense qui va d'autant plus contribuer à maintenir la structure osseuse et musculaire dynamique et saine.

    http://www.slate.fr/story/18441/retraite-mauvaise-sante-capacite-cognitive-etude


    Enfin, sans qu'on puisse en faire une généralité, pour certains "le travail c'est la mauvaise santé" du fait des problèmes liées aux postures et aux gestes répétitifs qui vont justement user le squelette...
    Bien que le phénomène soit très mal connu, pour d'autres le mal-être peut induire des pathologies somatique. Le mal-être de ces personnes se traduit par des troubles physiques... A ce niveau le reste n'est que spéculation et théories...

    En attendant le débat... ;)

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  2. Réflexion intéressante, qui a le grand mérite d’ouvrir le débat sur de nouveaux horizons et permet de battre en brèche quelques «automatismes intellectuels ».
    Néanmoins, plusieurs choses m’ont fait tiquer et vous connaissez la bête, je vais ici rebondir et tenter d’apporter un autre éclairage sur ces éléments.
    « notre jeunesse est consacrée à la formation pour un futur métier »
    Si l’instruction scolaire est souvent présentée comme telle, cela n’en est pas moins partiellement faux.
    Eduquer un individu en le formant, en lui apportant des connaissances, des manières de travailler, de réfléchir et d’agir, ne sont pas, à mon sens, forcément dans l’optique d’apprendre un métier.
    La culture générale, la créativité, les attitudes (compétitivité, altruisme, solidarité, entraide etc…) n’ont pas d’application uniquement dans le domaine du travail, loin s’en faut.

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  3. « sans salaire difficulté de subvenir aux besoins de ses proches et impossibilité de sortir »
    Je souhaiterais ouvrir ici une petite parenthèse : est-il forcément nécessaire d’avoir de l’argent pour se distraire ? Les chômeurs seraient-ils forcément condamnés à l’ennui et à la léthargie ? N’est-il pas possible, en sortant un peu du schéma habituel « objet=fonction=utilité=plaisir », d’en introduire un autre du type « imagination, créativité, contemplation, méditation, introspection, discussion, observation de la nature » qui pourrait tout autant nous divertir ?
    « Aujourd'hui a été réussi ce tour de force, presque improbable lorsqu'on en analyse avec le recul la genèse, de postuler que la souffrance est nécessaire à la production, à la création. Entendons-nous bien, pas seulement l'effort, la persévérance, mais bien la souffrance, la peine. »
    Je ne cite pas tout, mais l’ensemble de ton texte est mâtiné d’un sombre pessimisme selon lequel on ne travaille que pour gagner sa croûte et que pour cela, on doit nécessairement en chier.
    Je ne suis absolument pas d’accord avec cela, tout simplement parce-que tu oublies qu’il y a énormément de personnes qui font un job par plaisir, par passion, et qui sont ravies d’y consacrer du temps et de l’énergie, qui ne comptent pas forcément leurs heures, qui sont heureux de se lever le matin pour aller bosser, et qui tirent une grande satisfaction de leur travail (pas en termes d’argent, mais personnellement). Beaucoup de personnes ont choisi leur voie et se sont donné les moyens de le faire, et sentent qu’ils se réalisent dans leur métier.

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  4. « réduire très fortement notre temps libre »
    Sans trop vouloir entrer dans le débat, nous n’avons jamais, de toute l’histoire du travail salarié, eu autant de temps libre qu’aujourd’hui. Le problème n’est pas tant en termes quantitatifs, mais en termes qualitatifs (qu’est-ce que je fais de tout ce temps libre ?) et en termes technologiques (comment les inventions censées nous faire gagner du temps nous en font finalement « perdre » ?). Je renvois ceux que cela intéresse à l’excellent ouvrage d’Hartmut Rosa « aliénation et accélération, vers un théorie critique de la modernité tardive ».
    « Ici, c'est d'abord l'effort qui est mis en avant, supposé mériter le salaire que nous toucherons à la fin du mois, alors que la finalité de notre travail est au second plan, ne nous regarde presque pas, est l'affaire de notre employeur. » et « Je me risque à faire ma conclusion sur ce genre d'expérience : la souffrance n'existe pas ! Pourtant il y a bien eu travail, il y a bien eu production »
    Je crois que l’on confond souvent effort et souffrance/peine. Le premier correspond au travail qui devra être fourni, le second à un mal-être qui peut (mais ce n’est pas obligatoire) découler du premier. S’il parait difficile de faire son travail sans effort, beaucoup de personnes réalisent le leur sans peine, voire même avec plaisir.
    « Bien sûr qu'il resterait des activités ingrates dont personne ne souhaiterait se charger »
    Encore une fois, on peut s’interroger sur ce qu’est une tâche ingrate. Tu penses probablement aux éboueurs, aux « techniciens de surface », aux égoutiers et consorts. Pourtant, ces tâches ne sont ingrates que parce-que la société en a décidé ainsi, alors qu’elles sont indispensables. D’ailleurs, si nous vivions dans une utopie (cf. Utopie, de Thomas More), ces personnes seraient les mieux payées, car elles rendent le plus service à la collectivité, alors qu’un expert comptable ne rend service qu’à une entreprise privée aux intérêts limités à sa sphère privée. Il est donc important à mon avis de revaloriser ces métiers ou, mieux, de changer notre échelle des valeurs.

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  5. Enfin, pour répondre à Raphaël, le titre de l’article que tu cites est
    « La retraite est mauvaise pour la santé
    Une étude montre que le travail stimule les fonctions cognitives, lesquelles sont au contraire diminuées par l'inactivité. »
    Ce genre de phrase sous-entend que quand on est à la retraite, on devient un vieux croûton apathique puisque l’on n’est plus stimulé par rien, et surtout pas par le travail.
    Pourtant, la plupart des retraités sont très actifs, parfois même plus que lorsqu’ils étaient salariés. Et le travail ne concerne pas que l’activité rémunérée : tondre la pelouse, emmener les petits-enfants à l’école, faire des mots fléchés, constituent autant de travaux qui stimulent le cerveau, et de manière bien plus variée et, parfois, plus plaisante que par le simple « travail ».
    Et pour conclure sur une petite touche d’humour, en Uruguay, on dit que si le travail c’est la santé, que les malades se mettent à travailler !

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  6. Ces réactions me poussent à préciser mon idée et à tenter de la recentrer sur le cœur de ce que je souhaite exprimer, et c'est tant mieux. Je vais essayer de le faire en déferlant un peu moins et en reposant l'enjeu de ce questionnement qui me travaille, loin d'être une chose aussi simple à résoudre que cela a été dit (de nombreuses interrogations commencent à émerger dans ce domaine dans le débat public, montrant bien l'actualité du sujet). Et c'est bien parce qu'il est complexe que je l'ai soumis collectivement, je me serai contenté sinon de le garder pour moi.

    De multiples questions très intéressantes peuvent être abordées autour de ce thème du travail ; pour ma part je souhaitais en interroger les fondements faisant de lui le ciment actuel de la machine économique globale. Que l'activité physique soit un facteur de bonne santé du corps est une évidence sur laquelle je ne reviens pas. L'entrée par la Santé était une formule, rendue possible par cette expression que je trouvais révélatrice. Je le répète, il s'agissait de la Santé dans son sens plein (la définition qu'en donne l'OMS est intéressant sur ce point), étant plutôt quelque chose proche du "bien-être". Mon constat de départ, et plusieurs critiques tout à fait fondées ont été ici formulées à son encontre, c'est qu'aujourd'hui le travail ne permet pas à la majorité des individus d'accéder à un état de "bien-être". Ces critiques sont fondées (l'activité assainit et renforce le corps, les problèmes posés par une mission stimulent intellectuellement, le travail donne un rôle social, ...) mais je les contredis. Cela existe sans doute, même si je ne l'ai pas sous la main, des sondages montrant l'épanouissement des personnes, parlons des français par exemple, à leur travail. Les résultats seraient sans doute accablants tant je vois, autour de moi, beaucoup de gens trainant des pieds pour aller exercer leur métier plutôt que des gens heureux de se lever le matin. Dire qu'il existe "énormément" de personnes dans cette dernière catégorie me parait légèrement exagéré. Quoiqu'il en soit, s'ils existent, et je n'en doute pas, ils ont sans doute une recette à transmettre à tous les autres. Deux possibilités d'explication : premièrement psychologique, ces personnes sont dotées d'une capacité à se réjouir plus forte que la normale, en toute situation ils sont capables de se créer les conditions de leur bien-être. Deuxièmement plus systémique, ces personnes exercent un métier qui en soi crée beaucoup mieux les conditions d'épanouissement de n'importe quel être humain.

    Si je ne m'étais pas bien fait comprendre la première fois je le répète, c'est cette deuxième approche qui m'intéresse plus particulièrement. Partant du principe que le travail est une composante essentielle de la vie de l'individu moderne (sans doute l'a-t-il toujours été mais sous des formes vraiment différentes auparavant), comment faire en sorte que ce travail, ciment du système sociétal actuel, le rende heureux?

    Aucune possibilité, c'est mon avis, de dire que c'est déjà le cas (les situations de bonheur au travail sont selon moi trop rares et bien souvent de nature différente montrant que la norme du travail n'est pas efficiente aujourd'hui). Vu que ce n'est pas le cas, en considérant que le travail, dans sa finalité actuelle, est nécessaire à l'homme, comment reconsidérer sa forme pour permettre à l'individu un plus grand épanouissement? Enfin si ce n'est pas possible, que la souffrance semble nécessaire pour atteindre ce que l'on souhaite actuellement atteindre comme j'ai aussi voulu le démontrer, ne doit-on pas questionner ce que l'on cherche à atteindre? La piste de la décroissance pouvant ici être évoquée.

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  7. quel sujet Damien! il faudrait une soirée débat pour évoquer ce sujet dont actuellement philosophes, économistes et intellectuels d'horizons différents recherchent la forme d'un autre modèle social, face aux enjeux de la mondialisation, de la limite des ressources sur terre, de la population grandissante des fléaux de la pollution enfin une nouvelle voie dans le rapport du partage du travail, des ressources. IL y a des pistes intéressantes et personnellement je pense que l'oisiveté ne construit rien .Des thèses existent sur la diminution du temps de travail très intéressantes avec un autre temps pour se former , se cultiver., profiter d'activités diverses...au profit d'une vie sociale plus apaisée.

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  8. Vu à l'instant:

    http://fetedelaphilo.com/event-items/pour-qui-pour-quoi-travaillons-nous/

    Ca se passe demain soir...

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    1. Cool, tu nous feras un retour, ça pourra nous apporter un éclairage intéressant!

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  9. Je n'y suis pas allé, j'ai simplement transmis l'info

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  10. Le travail c'est la santé, si.....
    si on aime ce qu'on fait et si on y consacre un temps correct qui laisse la place aussi à autre chose. C'est un avis. Il me semble que dans le travail c'est comme en tout : les extrêmes sont mauvais, il faut trouver la voie du milieu, ce qui n'est pour la plupart des gens pas le cas aujourd'hui il me semble (d'où les dépressions, les burn-out, les maladies etc..)
    Je reviens alors avec "mon" revenu de base (sur lequel la Suisse réfléchit en ce moment apparemment). Ce pourrait être une piste ? comme la décroissance en est une aussi, peut-être les deux sont-ils complémentaires ?
    Si vous avez une heure et demi devant vous : voici un film

    https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=-cwdVDcm-Z0#!

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    1. Ca a l'air très intéressant mais je n'ai malheureusement pas le temps de visionner ce film pour le moment...j'ai top de boulot! :D

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    2. J'ai enfin vu le documentaire que tu mets en lien Mireille et il est extrêmement intéressant. Il éclaire énormément de choses sur la question et sur notre modèle économique actuel plus généralement.

      Ça m'a convaincu de la pertinence de la mise en application d'un revenu de base et surtout de la possibilité (financière en tout cas) de le faire. Quelques questions et réticences restent quand même mais en tout cas ces gens qui le proposent se battent pour des choses fortes et qui me semblent indispensables à introduire pour un avenir serein. Reste à savoir si nous verrons cela un jour ...

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  11. Au vue des réactions nombreuses sur le sujet, il faudrait que la personne ayant initié cette réflexion, propose une soirée débat :)
    J'en fais la demande !

    Surtout que répondre en commentaire écrit m'est difficile vu tout ce qui est abordé...
    Je souhaiterais un débat qui inclus une remise en question du fonctionnement social actuel si possible.

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  12. Ne rien faire c'est la conserver!

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